Début de l’aventure à vélo au Kenya, nous partons de Nairobi dans l’après-midi. A peine une quinzaine de kilomètres de la ville, le soleil baisse et nous cherchons notre premier bivouac. S’étendent au dessus de nous d’immenses champs enherbés et non clôturés, peu de gens aux alentours. Nous prenons un chemin et allons nous cacher dans les herbes hautes. L’endroit est superbe : terrain plat et meuble, les tours de Nairobi au loin, aucun bruit que ceux de la nature. Nous plantons la tente, prenons une douche, commençons à préparer le frichti en nous félicitant : que c’est simple le camping sauvage en Afrique (oui oui en Afrique : nous n’avons pas peur d’extrapoler).


Le soleil se couche, et nous voyons arriver deux hommes, long couteau à la ceinture*. « Vous êtes sur un terrain privé vous ne pouvez pas rester sauf si vous nous filez 60$ » On discute on discute, on ne sait pas qui sont ces gens, ni même s’ils ont quelque véritable lien avec le propriétaire du terrain. Le tarif est descendu à 20$ soit quatre fois plus cher qu’un petit hôtel, nous n’avons d’autre choix que de repartir. On coupe le gaz et on replie la tente, nous voilà sur la route de nuit à le recherche d’un endroit pour planter la tente.

Première silhouette que nous apercevrons dans la nuit en bord de route, nous nous arrêtons. « Hmm oui je connais un endroit où vous pourriez camper, laissez moi un quart d’heure». Attroupement autour de nous, discussions animées, coups de téléphone, nous ne comprenons rien.

Après 10 minutes : « c’est bon le patron a dit oui, venez. » On nous mène dans une immense propriété de style colonial, et un large choix d’emplacements « very safe » pour notre tente. Le patron n’est pas encore rentré mais nous avons rendez vous pour le petit déjeuner du lendemain.

8h tapante nous entrons dans l’immense demeure. Toute la famille nous attend autour d’une grande table. On nous sert à tous les deux un festin. Robin, oubliant toute règle de politesse élémentaire, se jette sur la bouffe. Panique à l’autre bout de la table : « la prière, vite la prière! » Oups, le bout d’omelette est déjà ingurgité mais gageons que la prière marche quand même.

Tout le monde sera finalement servi et Norman nous explique qu’il a hérité cette ferme de son grand père, celui-ci en étant propriétaire depuis 1965 (soit l’indépendance du Kenya). Ils produisent des champignons de Paris, quelques légumes et ont quelques bêtes mais l’essentiel de leurs 80 ha (où sont employés 90 personnes!) est utilisé à la production de café. On nous sert un café . . . soluble car le café produit ici est 100% destiné à l’export. Les kenyans boivent du thé !

Les petites filles nous emmènent faire un tour de la propriété, les parents multiplient les conseils et recommandations pour notre sécurité pendant notre voyage. Norman nous indique qu’il nous appellera dorénavant tous les soirs pour savoir où nous sommes et si nous sommes en sécurité. Et si il y a un problème, où que ce soit, il déboule.

Une dernière prière, et nous reprenons la route en se promettant de se revoir ici ou là.




 * Précision réalisée dans l’unique but de dramatiser notre récit de manière quelque peu artificielle : en effet, hommes, femmes et enfants travaillant au champs portent ce type de long couteau. Rien de particulièrement agressif donc. Au passage, cet outil peut être utilisé pour couper/trancher, mais aussi bêcher, tisonner un feu, ...